AUJOURD’HUI, JE PARTAGE AVEC VOUS QUELQUE CHOSE DE VRAIMENT TRÈS SPÉCIAL :
Hier, j’ai passé une partie de la nuit dans une cérémonie vaudou. On m’a informé qu’il ne s’agissait pas d’une cérémonie pour touriste mais bien d’une vraie cérémonie destinées aux haitiens.
Bon, ok.. alors je m’attendais à ce qu’on voit dans les films, "vous êtes dans une grande enceinte extérieure, assis à une table et vous buvez quelque chose en regardant le spectacle…" ce ne fut pas tout à fait le cas… alors je vous conterai mon expérience « vaudoue ». Qui fut pour moi une expérience vraiment excitante... quel dommage que je n'aie pas pu y retourner une deuxième soirée....
Premièrement, j’ai été invité par un maître vaudou à assister à une cérémonie pour la fête du 15 août (fête de Notre-Dame). En fait, j'ai demandé si je pouvais y assister et ma demande a été accueillie avec un grand sourire et, je dirais même avec étonnement... La cérémonie vaudoue du 14 août (celle à laquelle j'ai assisté) rappelle la célèbre cérémonie de Bwa Kayiman (Bois Caiman) qui a eu lieu la même date, il y a plus de 200 ans, au cours de laquelle le Oungan Boukman a prononcé son discours incitant les esclaves à la révolution. Ceux-ciont décidé que c’en était assez de vivre l’esclavage… la révolution a débuté et la liberté fut durement acquise. (je résume, selon ma compréhension de ce qui m'a été dit.. en créole.)
Donc, il est 21h00, mon « lift » vient me chercher. J’y vais accompagné d’une autre volontaire (j’ai réussi à la faire inviter… ) et de quelques collègues et amis de la mairie. (vraiment, je me suis fait de bons amis ici, qui m'accueillent comme l'un des leurs... je leur en serai toujours reconnaissant...)
Arrivé au centre ville, nous récupérons, Richard, celui qui nous invite au « péristil » … Richard est un maître vaudou.
Bon, une petit pause lexicale :
Bizango : société secrète vaudoue
Oungan : prêtre vaudou
Ounfò ou Peristil : temple vaudou
Poteau Mitan : axe cérémonial (c’est un poteau se trouvant au milieu du péristil)
Bon, alors voilà… je m’en vais assister à une cérémonie tenue par les Bizango et destinée aux haitiens. Il ne s’agit pas d’un spectacle pour touristes et, vous l’aurez compris, il ne s’agit pas non plus d’une cérémonie secrète destinée aux initiés.
Alors, arrivé au centre-ville de Port-au-Prince, la nuit, donc il fait très noir, nous nous stationnons dans une ruelle pas éclairée. Nous nous éclairons à l’aide de la lueur émise par l’afficheur de notre cellulaire. Et nous nous engageons dans un corridor d’environ 100m, où il règne une odeur de latrine. Il faut faire attetion pour ne pas trébucher. Honnêtement, l’endroit est inquiétant et je ne m’y serais pas aventuré seul, mais je suis bien accompagné.
Nous arrivons au péristil, il s’agit d’une salle d’environ 5m par 20 m. Le plafond est parsemé de drapeaux haitiens. Il y règne une chaleur étouffante et elle est bondée de monde. Évidemment, nous avons la chance d’être accompagné de Richard et on nous donne des chaises pour s’asseoir. Nous sommes à quelques pieds du poteau mitan, que vous voyez au centre de la photo précédente. Dans les faits, nous sommes assis à même la salle où tout se passera. Nous ne serons pas des témoins éloignés, nous faisons partie du rituel.
La couleur qui règne ici est le rouge… comme vous le verrez sur les photos…
La musique commence, les chants débutent, les tambours battent la cadence… et les incantations débutent. Le tambours ont un rythme tout à fait entraînant.
Remarquez sur la photo précédente la grosse bouteille en retrait, sur le pied du poteau mitan... je vous en reparlerai plus tard...
Il règne une atmosphère de fête et de joie… On nous distribue une bouteille de rhum pour ceux qui désirent s’humecter les lèvres…
Je ne pourrai pas prétendre vous expliquer les symboles de tout ce que j’ai vu parce que je ne les connais pas. Et je ne vais même pas extrapoler… mais je sais une chose, je suis dans un endroit où très peu d’étrangers mettent les pieds.
Nous suons à grosses gouttes et je suis totalement détrempé. Régulièment, des danseurs prennent du rhum dans leur bouche et le soufflent vers les chandelles, alors la chaleur monte, et de plus, une odeur poignante et épicée de cire nous agresse les narines et nous fait pleurer des yeux… mais ouf! Quel spectable !!!
Lors de la séance de danse, qui devient plus frénétique (nous sommes assis à regarder les danseurs, nous ne danserons pas ce soir, mais nous serons littéralement, dans le spectacle)…. Alors, lors de la séance de danse, un prêtre est pris de consulsions et il s’effondre, la musique s’arrête, on lui donne quelque chose à boire, il se relève et danse… les incantations commencent à porter fruit.
Le Oungan que vous voyez, la grosse bouteille à la main, sera momentanément "possédé" et sera pris de crises, de soubresauts... il s'aspergera de cette concoction et tombera évanoui pour quelques minutes, la musique arretera, il se lève... et tout recommence, comme rien n'était arrivé... d'ailleurs, à titre d'information, il est le grand maître de la place, il est le propriétaire...
On me présente au Oungan et à d’autres personnes… je réalise que je suis entourés de gens influents … des professeurs d'université, des gens publics et des haitiens qui viennent de plusieurs pays pour célébrer cette fête. Nous avons rencontré un couple d'haitiens en provenance de Boston (USA et non pas Boston, Cité Soleil). Gen tout kalite moun...
La danse continue, un cercueil rouge est introduit dans la salle et deux danseurs, qui le portent sur la tête, dansent avec le cercueil. Les tambours battent à un rythme totalement endiablé… c’est la grande fête…
Vous remarquerez aussi qu'il y avait une grande quantité de fumée dans la salle...
Ensuite, un groupe de personne est réuni, dont nous faisons partis et nous sommes bénis par le Oungan. Cette bénédiction durera plus de 20 minutes où nous sommes debout, la main droite sur le coeur et le Oungan nous adresse un discours de bénédiction. C’est en créole, je ne pourrais vous traduire. Mais j’admets que j’éprouvais une très grande fierté à participer à cette cérémonie. Nous sommes bénis avec du champagne qui nous est versé sur la tête à tous. (alors là, j’étais mouillé avant la bénédiction, mais je suis maintenant détrempé, mais tellement honoré et fier d’être présent que j’aurais pris une douche complète au champagne pour être là !)
J’avoue que je bombais fièrement le torse, sans même m’en rendre compte, mais je me sentais comme faisant partie du groupe, comme admis par les Oungans dans la cérémonie ….
Richard, me tend un cruchon en vitre contenant du rhum et des branches, des herbes et autres choses. (que vous avez vu plus tôt) Plusieurs boivent de cette concoction lors de la fête. Les Oungans, les Ounsi, quelques danseurs et les privilégiés qui, comme moi, ont été bénis. Il me dit : « fais une demande! » Alors je prends le cruchons, je le porte à mon cœur et à mon front (comme j’ai vu des gens faire), le lève au ciel et en bois une bonne gorgée… c’est du rhum blanc aromatisé… délicieux, mais surtout… ouf! Quelle symbolique!. Quelle fierté!
Le sacrifice est apporté dans la salle:
Lorsque la bénédiction est terminée, les danses reprennent… le sacrifice a lieu (dont j’omettrai les détails, ceux-ci n’ajoutant rien au récit.) Peut-etre que je vous expliquerai un jour... mais pas aujourd'hui...
Les danses sont tout à fait frénétiques, pleins de gens dansent et la musique bat son plein. Les « cracheurs de feu » reviennent et se mêlent à la foule… alors la chaleur, qui était déjà assez présente, devient très élevée dans la salle… je ruisselle de partout. Je suis dans un vrai sauna… Quelle ambiance. D'ailleurs, j'ai voulu filmer, mais ma caméra ne pouvait pas prendre l'image en raison de la noirceur, mais j'ai un peu de musique, on y entend les chants et les tambours... c'est super...
Alors un jeune homme se met à crier, tombe par terre, est pris de convulsions, la musique arrête, on le relève et tout le monde se remet à danser…
La soirée se terminera pour nous vers 1h15 du matin. Mon lift doit quitter... je ne peux pas rester plus longtemps car je ne pourrais retourner chez moi! Mais la cérémonie, elle, continuera jusqu’au matin. De retour à la maison vers 1h30, nous discutons un peu de notre expérience (nous sommes tellement contents d’y avoir asssisté) et pouf, je plonge dans mon lit, encore transporté par l’expérience. (ha oui, pour ceux ou celles qui se posent la question, OUI, j’ai transité par la douche avant de plonger sous les draps dans mon lit… )
J’ai vécu ce soir ce que peu de gens peuvent prétendre avoir vécu. J’ai vu ce soir un spectacle fascinant, merveilleux et, surtout, chargé de mystères… une fois de plus, je me suis senti le bienvenu dans ce pays qu'est Haiti. Le Ouangan m'a dit: "Mon frère, ici, dans mon pays, dans Haiti, tu es chez toi.... Ou lakay ou." Je n'ai pu que le prendre la main et le remercier chaleuresement et lui dire que je suis honoré d'être admis de la sorte.
Mais quel honneur d’avoir pu y assister au moins une fois, d’y avoir été admis et d’avoir reçu la bénédiction du Oungan.
Et j’ai maintenant un million de questions à poser à mon ami Richard.
Je suis arrivé à Haiti avec des tonnes de questions en tête, cherchant des réponses. Je quitterai avec certaines réponses, mais encore plus de questions!
Je vous laisse sur une image de prière... et de bénédiction...
À bientôt!
rik